jeudi 20 octobre 2011

Il dit la vérité, mais pas toute la vérité!

Aujourd'hui est parue une interview de Pierre Mariani (CEO de Dexia Holding). Une bonne partie de ce qu'il dit est vrai. Ce qui serait plus intéressant, et une vraie réponse aux questions, est ce qu'il ne dit pas.

Les défaillances pointées par le régulateur français (dans la valorisation des swaps, dans le niveau d’information provenant des filiales, dans l’évaluation de la réserve AFS …) étaient en grande partie bien connues… chez Dexia Bruxelles. L'incapacité de DCL de produire des chiffres corrects était connues depuis des années mais n'a jamais été corrigée par le management (y compris Mariani). Il fallait protéger les "Français", leur laisser gérer leur domaine, ne pas mettre en évidence leur lacunes. La réponse en interne aux questions externes des régulateurs n'était pas "comment corriger le problème" mais "comment cacher le problème aux régulateurs"! Les responsables des graves lacunes pointées par le régulateur n'ont jamais été sanctionnés.

Une question sur le collatéral était: Une des causes des besoins de liquidité qui ont causé la perte du groupe, ce sont les collatéraux, ces montants mis en garantie face aux portefeuilles de produits dérivés de taux (de “ swaps de taux “, pour les initiés). Pourquoi ne pouvait-on pas déconstruire ce portefeuille de swaps ?

Ce que Mariani ne dit pas, c'est qu'une bonne partie du collatéral provenait de transactions inutiles. Le management de Dexia, y compris Mariani, n'a jamais osé imposer aux entités DCL et BIL de faire ses transactions de produits dérivés (en particulier les "swap") en interne (avec DBB). DCL et BIL faisaient des tas de transactions avec des contreparties extérieures au lieu de les centraliser (et en faire moins) chez Dexia Belgique ou l'expertise se trouvait. Il est peut-être plus facile pour un structureur français de faire des transactions avec les branches locales de grandes banques, de prétendre qu'on fait jouer la concurrence (et de se faire inviter régulièrement au restaurant) que d'avoir une idée précise du prix et de faire la transaction avec Bruxelles. Il n'y a jamais eu de volonté du management de retirer le pouvoir local que DCL s'était octroyé.

Les erreurs de valorisations des swaps ont coutés quelques dizaines de millions à Dexia dans la faillite Lehman (certaines transactions avec Lehman étaient mal valorisées ou pas valorisées du tout). Elles ont aussi coute quelques dizaines ou centaines de millions en liquidité car dans certains cas "on" faisait confiance aux contreparties au lieu de faire appel a l'expertise qui existait en interne (en particulier chez Dexia Belgique)… Oui il y avait des problèmes avant 2008 chez Dexia, en trois ans a la tete de Dexia Mariani ne semble pas avoir corrigé beaucoup de problèmes, même ceux qui étaient bien connus en interne, pour lesquels il y avait des solutions en interne mais que les jeux de pouvoir empêchaient.

Mariani, engagé par le politique pour gérer des situations difficiles, a échoué dans la gestion de ces situations et en particulier dans la gestion des enjeux politiques internes; peut-être à cause de pressions politiques externes, peut-être par une méconnaissance du fonctionnement réel d'une banque.

L'automne, quelque part en Belgique.